Il n'est pas simple de déterminer
tous les biens que possédait Jacques Coeur. Lors des recherches
du procureur Dauvet de 1453 à 1460, connus par son livre
de compte publié par Michel Mollat, il est désormais
possible de connaître avec une certaine précision
les terres, châteaux, maisons que le grand Argentier possédait
alors, et qui n'avait pas été dissimulé,
par oubli ou jeu d'écriture de ses fidèles ou de
sa famille.
Dans cet article, nous allons donner
plusieurs éléments sur les possessions de Jacques
Coeur, car il s'agit d'un domaine où le site des Amis
de Jacques Coeur est souvent sollicité.
Les biens de Jacques Coeur à
Bourges et Berry
Le Puissaye
La région de Saint
Pourçain
Tours et la Touraine
Les pays du Roannais
Les mines du Forez
La région du Langueoc
et de Montpellier
La région de Paris
Les autres lieux de France
La finalisation a été
faite en 2012 à partir de l'ouvrage de Robert Guillot
sur "La chute de Jacques Coeur".
Nous avons ajouté Les mines de
Jacques Coeur et les navires de Jacques Coeur
De nombreux historiens ont cherché
l'ampleur de la fortune de Jacques Coeur, on connaissait son
palais de Bourges, " la Grand'Maison ", ou la loge
de Montpellier, mais il avait beaucoup plus de biens, des terres
et autres châteaux, en voici une première liste
qui n'est pas complète, mais les travaux des grands historiens,
comme Jean Yves Ribault, Jacques Heers, Robert Guillot, Michel
Mollat, à partir des documents du procureur Dauvet permettent
de cerner ce problème.
Attention, il y a sans doute des manques
comme les propriétés d'Angerville ou celles de
Paris, qui font toujours pari des études et recherches
en cours par les Amis de Jacques Coeur, tout comme le Château
de Dame qui Jacques Coeur aurait donné à Agnès
Sorel, pour l'instant une belle légende, très romantique
mais qui reste une légende.
Les biens de Jacques Coeur
à Bourges
Jacques Cur par achat où par
héritage possédait un certain nombre de propriétés
et de biens dans sa ville natale de Bourges.
:
-par lui même :
- La Grant' maison, c'est à dire le palais Jacques Coeur
actuel.
- L'hôtel ou il habitait à
l'angle de la rue de Linière et de la rue du Vieux Poirier
- par son père :
- la maison située à l'angle de la rue d'Auron
et de la rue des Armuriers, en la paroisse Saint Hippolyte, vendue
à Hans Havenal qui était cranequinier du roi.
- la maison contiguë
-par sa belle famille
- La maison située à l'angle de la rue d'Auron
et de la rue des Armuriers. (côté palais du Duc
Jean, c'est actuellement un Pub avec la plaque de la " fausse
" maison natale de Jacques Coeur )
- La maison contiguë située
du même côté, qui sera sans doute celle adjugée
à Pierre Bruzay, un orfèvre.
Il faut ajouter plusieurs autres biens
comme :
- Rue Gambon où il possède
aussi une maison, c'est la cinquième maison à partir
de la rue des Trois Pommes, en face de l'hôtel Dieu.
- Un morceau de muraille de huit toises
des anciennes murailles de Bourges, près de la place Gordaine,
et qui furent acquises par Guillaume Lallemant.
- Place Gordaine , il possédait
aussi pour moitié une maison attribuée en 1457
pour une somme très faible à Jacuète, veuve
de Guillaume Bruzay.
- Place Gordaine, il a possédé
une maison avec une rente " correspondant à un change
assiz en la ville de Bourges ". Elle sera attribuée
à Martin Anjorrant.
- Place Gordaine il avait une masure et
une place vide place Gordaine, qui fut acquise par Pierre Pissoire,
un bourgeois de Paris en 1456.
- Rue des Arênes, dans la paroisse
de St Pierre-le-Guillard il avait une maison qui fut acquise
en 1457 par Jean Hager, pelletier de Bourges.
- rue de Montchevry il avait un emplacement
et un verger, qui est la rue Gambon actuelle.
- Un terrain près de la porte Courtine
qui sera adjugé à Guillaume Lallemant en 1456.
- " Trois festz de maison " à
Bourges acquises par Jean Guionnet.
- A Asnières, des dépendance
dans le village d'Asnières, qui était semble-t-il
une grange qui fut attribuée en 1456 à Jean Colichon
et Robin Hontaire, archers de la garde du roi. ainsi que dans
l'îlot Saint Hippolyte.
Les biens immeubles de
Jacques Coeur en dehors de Bourges
Ce sont des biens que possédait
Jacques Coeur où dans lesquels il avait et percevait des
rentes. Ces bien ont été listés par le procureur
Dauvet après la condamnation de l'Argentier du roi, et
ils apparaissent dans " le journal du procureur Dauvet "
publié par Michel Mollat et une synthèse a été
publiée plus récemment par le professeur Robert
Guillot.
Ce n'est sans doute pas une liste exhaustive,
mais c'est un travail d'historien qui ne doit pas laisser passer
beaucoup de terres et autres châteaux.
On trouve ainsi dans ce que possédait
Jacques Coeur :
- Les Biens de Puisaye :
- la seigneurie de Saint Fargeau avec
le célèbre château encore visible aujourd'hui
dans l'Yonne.
- La terre de Toucy dans l'Yonne
- La terre de Malicorne, Champignelles
et Villeneuve, toujours dans l'Yonne.
- les terres de Melleroy, de Saint Maurice
cdans le Loiret (Aveyron ?)
- Les Biens du Roannais :
- La co-seigneuries de Roanne et de Saint
Haon-le-Châtel dans la Loire.
- La seigneurie de la Motte et de Saint
Romain (Saint Romain la Motte) dans le canton de Saint Haon
à quelques kilomètres de Roanne, dans la plaine
du Forez.
- Le château de Boisy dans la canton
de Roanne sur la route de Renaison.
- Les Biens du Berry (ailleurs qu'à
Bourges)
- Les Biens de Menetou-Salon dans le canton
de Saint Martin d'Auxigny.
- La seigneurie d'Ainay-le-Vieil vendue
à Charles de Culan en 1455.
- Les Biens de Marmagne dont le château
dans le canton de Mehun-sur-Yèvre.
- Les Biens de Maubranches avec le château,
situé à la sortie nord de la ville de Bourges,
dans le canton de Baugy.
- Seigneurie de Barlieu dans le Cher à
proximité de Vailly-sur-Cher. ces biens seront attribués
à Jean de Bueil.
- Une terre dans la paroisse de Chabris
dans l'Indre dans le canton de Saint Christophe en Bazelle.
- Des pièces de terre, une maison
et une maisonnette dans la paroisse de Liry (ou Lizy ?)
- Des pièces de vignes près
du chemin allant de Bourges à Marmagne, qui fut adjugée
à Jean Bellestat en 1457.
- Les Biens du midi et du Languedoc
- les terres de Bessan dans l'Hérault
à proximité de Béziers.
- Les terres de Vias dans la même
région.
- La " Grand'Maison " de la
rue Embouque d'Or à Montpellier, retenue par le roi, puis
attribuée à Jean Forestier
- Des maisons et des biens divers à
Béziers attribués pour une somme assez faible
au seigneur de Montpeyroux.
- Le mas d'Encivade à proximité
de Montpellier dans l'Hérault.
- Une maison à Marseille près
du port, un immeuble du notaire Rodeti attribué par la
municipalité de Marseille.
- Une maison à Montpellier adjugée
à Philippe de Crapona.
-Une maison à Beaucaire adjugée
à Jean de jambe.
- Une étable à Montpellier,
acquise en 1454 par un marchand de cette ville.
- Deux emplacements à Montpellier
devant l'église Notre Dame des tables, qui fut adjugée
à un bourgeois de Montpellier, Jamet carcassonne.
- Les Biens du Bourbonnais
- La seigneurie de la Bruyère-L'aubespin
dans l'Allier, c'est à proximité de Cérilly
en forêt de Tronçais.
- Biens de St Gérand de Vaulx
dans l'Allier attribués à Catherine de Maignelais,
la mère d'Agnès Sorel.
- Biens de Saint-Loup dans le canton de
Neuilly-le-Réal.
- Une maison et des biens à Saint
Pourçain sur Sioule attribué au premier médecin
du roi.
- Des Biens fonciers et des rentes près
de Saint Pourçain dans l'Allier, attribués aussi
au premier médecin du roi en 1456.
- Une rente sur plusieurs maisons à
Moulins dans l'Allier.
- Une rente sur un hôtel de Saint
Pourçain, qui fut acuise par Michel Héron, un bourgeois
de Saint Pourçain.
- Banvin (droit féodal) et des
rentes à Saint Pourçain.
- Une rente sur un hôtel de Saint
Pourçain adjugée à jean de La Loère
en 1456.
- Les Biens de Touraine
- L'Hôtel de l'Argenterie près
de St Saturnin à Tours attribués à un cannonier
du roi.
- Une maison à Tours adjugée
à un chaussetier de Tours en 1453
- Les Biens du Rhône et de
Lyon
- La " maison ronde " devant
l'église Saint Nizier à Lyon.
- La " Grand'Maison " de la
rue Mercière à Lyon.
- La Maison de la Rose de la rue Mercière
de Lyon.
- Une maison et un moulin à papier
à Rochetaillé pas très loin de Lyon, dans
le canton de Neuville-sur-Saône. ces biens furent attribués
à l'archidiacre de Lyon en 1455.
- Une maison à Lyon dans une rue
qui allait de Saint Nizier au pont sur la Saône et qui
fut attribuée à un maître potier d'étain
de Lyon.
- Une rente sur une autre maison située
rue Mercière à Lyon.
- Un jardin à Lyon rue raisin,
acquis par un notaire royal.
Les mines de Jacques Cur
C'est à partir de 1444 que Jacques
Cur s'intéresse aux mines. Il est à un sommet
de sa gloire, et Charles VII lui accorde par lettres patentes
données à Montargis le 24 juillet le droit d'exploiter
certaines mines de plomb, d'argent et de cuivre dans les monts
du Lyonnais.
(revenu du droit régalien de un dixième des métaux
extraits.)
Les mines sont à 25 à 30
kilomètres à l'ouest de Lyon, la plus importante
est située à Paimpailly à une altitude de
500 mètres, dans un terrain volcanique primaire très
minéralisé avec de la galène (sulfure de
plomb) argentifère.
Mais ce n'est pas une création,
mais une reprise d'exploitation.
La question essentielle c'est de savoir
dans ce domaine si Jacques Cur a gagné de l'argent
? Il semble que non. Selon les livres de compte, dont la tenue
laisse à désirer, mais aussi par les écrits
de Dauvet, "il appert clèrement qu'il y a eu perte
en la compagnie".
On estime que la production d'argent pour un an à Paimpailly
représentait la consommation de 2 mois d'un petit atelier
monétaire, pas de quoi faire fortune, mais est-ce exacte
?
Mollat dit que l'on extrayait 970 quintaux de plomb et 210 kilogrammes
d'argent envoyés à la monnaie de Lyon.
N'a-t-on pas minimisé les gains et la quantité
d'argent ?
On affirme aujourd'hui que Jacques Cur
devait investir et moderniser les mines pour être rentable
et qu'il n'en a pas eu le temps.
En conclusion sur ce point, il avait bien
perçu cette industrie mais il n'avait pas eu le temps
et les moyens de rentabiliser cette affaire.
Il possédait les mines suivantes
:
- Pampailly :Des mines de plomb argentifère
dans le canton de Saint Laurent de Chamousset.
- Chessy : la moitié des mines de
Chessy dans le Rhône (Le Bois-d'Oingt) qui furent retenues
par le roi en 1455.
- Saint Pierre-la-Palud : les mines de
Saint Pierre-la-Palud dans le Rhône c'est dans le canton
de l'Arbresle.
- Joux : la moitié des mines de
plomb argentifère, c'est dans le canton de Tarare.
En cherchant dans les autres biens de Jacques
Coeur, il est important de connaître les navires de "
sa flotte ".
Les navires de Jacques Cur
:
La méditerranée est la chasse
gardée des Génois et Vénitiens.
Parmi les écrits qui se transmettent
au fils du temps, ses débuts d'armateur sont intéressants.
On dit que Jacques Cur commande en 1443 une galée
aux chantiers de Gènes, le délai est très
court, il la reçoit, la baptise Notre Dame Saint Denis
et s'empresse de la ramener à Aigues Mortes afin que les
charpentiers locaux la copient pour en faire de semblables.
C'est peut être vrai, mais le bateau est acheté
au titre des galées du roi, et financé par le roi,
et surtout, on ne sait pas grand chose des bateaux suivants,
ni de leur provenance, ni de leur chantier de construction. Il
y a donc un vraie légende tendant à montrer, soit
qu'il était bien un escroc, soit qu'il était débrouillard
et très fort.
En réalité, c'est le roi
Charles VII qui commande cette galée Notre Dame Saint
Denis et un an plus tard, il nomme Jacques Cur comme gérant
du bateau. Il est en outre responsable de l'armement et de l'équipage
qu'il doit recruter.
Ce navire quitte Aigues Mortes, et fait escale à Marseille
en 1445, on sait que plusieurs marchands vont embarquer, très
intéressés, semble-t-il par le commerce des épices.
Par exemple, la galée, La Madeleine
est achetée au nom du roi par Jacques Cur aux Chevaliers
de Rhodes.
L'argentier en prend possession, mais le confit à un capitaine
local Michel Teinturier, de Montpellier.
Les archives ont montré que les
deux premières galées de France en octobre 1446
étaient dans le port de Marseille et partaient pour le
Levant avec plusieurs marchand à leur bord, sans doute
des notables de la ville.
Il fait construire deux autres navires,
ils ont tous un double nom : Notre Dame Saint Jacques, Notre
Dame Saint Michel.
On sait qu'ils ont pris la mer en 1447 ou au début de
1448, mais nul ne sait où ils furent construits.
Dernier bâtiment des galées
connu de Jacques Cur, la Rose, qui a été
mise en chantier en 1450.
La flotte est formée de galées,
mais les mots différent beaucoup à cette époque.
C'est une embarcation de 40 à 50 mètres de longueur,
avec 5 à 6 mètres de large. C'est donc un gros
bateau. On peut transporter 150 à 200 tonnes de marchandises
ou objets précieux. C'est donc un commerce important.
Lorsque la galée revient, il y a "gros à vendre".
Lorsque la galée sombre ou est prise par les pirates,
c'est la ruine.
Une galée qui peut être à voile ou à
rame comprend 150 à 200 rameurs.
Jacques Cur possède 4 galées
dans un premier temps ce sont 2 galées, et 4 à
partir de 1447. La grande flotte de Jacques Cur est donc
assez modeste.
4 bateaux, ce n'est pas grand chose.
Le chiffre ira jusqu'à 7 ou plus sans savoir à
qui elles appartiennent.
Combien Jacques Cur possédait-il
de navires,
Nul ne le sait avec exactitude. Ce qui
est certain, c'est que lors du séquestre des biens de
Jacques Cur, le procureur Dauvet en a comptabilisé
4 navires.
Il semble que le nombre de navires était assez proche
du chiffre de 7. C'est en tout cas la conclusion à laquelle
arrivent Michel Mollat et Jacques Heers.
Les navires de Jacques Coeur :
- la Notre-Dame-Saint-Denis
On connaît bien ce bateau qui était de retour d'Orient
au moment de l'arrestation de Jacques Cur. Il était
commandé par Gauillardet de la Farge.
Ce navire fut vendu par le procureur Dauvet en 1454, il était
en mauvais état après 12 ans de navigation.
- la Notre-Dame-Saint-Michel,
qui était commandée par Guillaume Gilmart.
- la Notre-Dame-Saint-Jacques,
ce navire fut vendu quelques jours après l'arrestation
de Jacques Cur par Ursin Botet, afin que le navire échappe
au séquestre. C'était une vente fictive. Ce navire
sera assez vite placé sous les ordres de Jean de Village.
- la Santa-maria-e-Sant-Jacques
dont on ne sait pas grand chose.
- la Rose
qui était un navire en train de se terminer.
On évoque aussi un navire appelé la Notre-Dame-Sainte-Madeleine.
Ce navire fut largement connu comme "la
grosse galée de Mgr l'Argentier", car il était
semble-t-il énorme par rapport à d'autres galées.
Ce qui est certain, c'est que 4 navires
après l'arrestation seront mis sous séquestres
et retrouvés par Jean Dauvet.
- la Notre Dame Saint Denis, arrive au
large de Marseille au moment de l'arrestation du grand argentier.
Elle partit pour l'Espagne.
- La Notre Dame Saint Jacques, qui est à Marseille et
est vendue fictivement pour échapper à la prise
du navire.
- La Notre dame Saint Michel
Mais il y a d'autres navires comme la Santa
maria e saint jacques, qui est avec La rose, un navire du Grand
Argentier.
Il reste à établir les autres
biens de Jacques Coeur, il avait des tapisseries, c'est certain,
mais le " trésor " de Jacques Coeur en pièces
d'or existe-t-il ? Nul ne sait, mais il fait rêver !
Il sera possible d'établir le reste
des biens à partir des documents du procureur Dauvet.
Complément :
Le château de Dame dans le canton
de Saint Eloi de Gy
C'est un château qui date de la fin
du XIV ième siècle et retouché au XIX ième
siècle, Il était autrefois entouré de tours
et même d'un donjon, qui furent détruits.
Il existe encore avec un grand logis d'habitations encadré
de tours rondes, ce qui rappelle leur aspect d'origine.
Le château garde le souvenir d'Agnès
Sorel, pour deux raisons :
- la première c'est le nom " Dame " car on l'appelait
la Dame de Beauté, à la fois parce qu'elle était
particulièrement belle, et aussi parce que le roi Charles
VII lui avait acheté le château de Beauté
en région parisienne, détruit aujourd'hui.
- la seconde c'est un château qui a sans doute abrité
un temps, et de manière épisodique les amours de
Charles VII et de sa maîtresse. Buhot de Kerser en parle
comme une légende, et depuis chacun en ajoute un peu,
" Charles VII, qui était à Bourges ou à
Mehun sur Yèvre prétextait une partie de chasse
dans la forêt de Haute Brune et venait rejoindre sa maîtresse
".
à suivre
Roland Narboux